Le Burundi pénalise l'homosexualité

Publié le par RV.A.



Le Burundi vient grossir les rangs des pays africains qui pénalisent l’homosexualité. C’est un non-événement penserait-on car l’Afrique est en grande majorité homophobe et relevé une nouvelle fois un tel pléonasme ne tiens que de la redondance. J’ai cependant décidé de revêtir mon tricot à la bannière arc-en ciel, de me faire militant (ça n’arrive pas tous les jours) et d’en parler.


Alors quelles sont les faits ?




Le 22 avril 2009, le président burundais Pierre Nkurunziza a fait promulguer en toute discrétion un nouveau code pénal dont l’article 567 criminalise les pratiques homosexuelles de trois mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 50.000 à 100.000 francs CFA soit 32 à 64 euros. Pour le président burundais ce décret est en accord avec la culture et les coutumes locales.


Petit parallèle avec le Cameroun

Le Cameroun n’a évidemment pas attendu 2009 pour punir l’homosexualité puisque c’est en 1965 (revu en 1967) — oui, il y a des choses pour lesquelles nous avons de l’avance aussi sinistre soit-elle — que le code pénal sanctionne « d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 20.000 à 200.000 francs (CFA) toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son sexe. » (Code Pénal (Loi No. 65-LF-24 du 12 novembre 1965 et Loi No. 67-LF-1 du 12 juin 1967) 20 Art. 347 bis – Homosexualité).

Ce qui est intéressant dans l’article camerounais pour avoir conversé avec quelques juristes, c’est l’expression « rapport sexuel ». En effet, être poursuivi pour délit d’homosexualité par le ministère public au Cameroun nécessite de faire la preuve d’un rapport sexuel homosexuel (avec tout ce que ça comporte :D) car on ne peut être accusé d’homosexualité sur de simples présomptions ; et cela rend l’application de la l’article particulièrement retors. C’est plutôt rassurant !

Au Burundi, en revanche, ça rigole moins. L’expression très élargie « pratiques homosexuelles » retenue dans l’article ne laisse présager rien de bon. Je crains déjà pour les accolades « innocentes » et très viriles des sportifs en célébration de leurs buts. C’est là tout le drame de l’homophobie, cela même si nous savons tous que cette peur en cache une autre et sa plus violente expression ne sert qu’à la dévoiler. JUNG est loin d’avoir tort.

 

Selon un communiqué diffusé par Human Rights Watch, 63 organisations burundaises et internationales ont déjà dénoncé le caractère homophobe du nouveau code pénal burundais. Une pétition émise par ces organisations court pour l’abrogation de l’article 567 qui selon elles porte atteinte aux droits fondamentaux. C’est là tout le paradoxe (ou la stupidité) de l’Afrique en matière de droit qui reconnaît en préambule de la plupart de ses constitutions la primauté de la charte internationale des droits de l’Homme sur elles.

Les mêmes organisations déplorent aussi « que cette loi compromette les efforts du Burundi dans sa lutte contre le sida, en marginalisant encore davantage une population à risque. »

 

Triste rappel :

Au Cameroun, en mai 2005, neuf personnes ont été interpellées par la gendarmerie dans une discothèque de Yaoundé pour délit d’homosexualité et sept d'entre elles ont été condamnées plus tard à 10 mois d'emprisonnement.

En février 2006, deux Camerounais de 23 ans ont été condamnés à un an de prison pour délit d’homosexualité. Un autre de 22 ans est détenu depuis fin 2004, pour le même motif mais est toujours en attente de procès.

 

Personne n’a oublié l’affaire des homosexuels présumés au Cameroun en 2006 quand le journal camerounais La Météo publiait une liste d’homosexuels parmi les personnalités politiques. Il s’en est suivi une série de procès pour diffamation et un prétendu débat dans la société camerounaise.

Pour beaucoup de mes amis cette nauséabonde affaire avait au moins le mérite de lancer le débat sur l’homosexualité au sein de notre société avec à la clé peut-être une légère avancée dans les mœurs. Pour moi, il n’en était rien parce que le lambda ne sait pas de quoi il est question. Le débat était biaisé dès le départ parce que pour le camerounais hétéro de base, le fantasme est à la hauteur de l’opacité qui entoure l’homosexualité. Il en fait un critère d’ascension sociale ou un phénomène empreint de mysticisme. J’ai été brièvement éclairé d’une lueur d’espoir lorsque notre président Paul Biya s’est attaché à rappeler l’importance de respecter les libertés individuelles, ceci quand les détracteurs de son gouvernement exigeaient de lui une réponse. Il n’avait sans doute pour objectif que de protéger ses amitiés. Trois ans plus tard, nous en sommes au même point : une société totalement schizophrène sur le sujet.

Publié dans Politique

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